Joseph Joffo
JC Lattès, 252 pages
1973
Un sac de billes est le récit autobiographique de la fuite de deux enfants sur les routes de France pendant l’Occupation. Quand vint l’ordre donné aux juifs de porter l’étoile jaune, le père de Joseph, 10 ans, et Maurice 12 ans, leur ordonna de quitter Paris pour rejoindre leurs frères à Menton.
Commence une aventure pleine de dangers qui leur fera traverser en culotte courte la France et la guerre, rencontrer les pires salauds, SS ou collabos mais aussi les héros ordinaires d’une France occupée, la France des tickets de rationnements, des faux-papiers, des interrogatoires, de la chasse aux juifs et aux résistants.
Un sac de billes a été écrit et publié trente ans après les faits par Joseph Joffo (avec l'aide de Claude Klotz). Il raconte avec beaucoup de tendresse, d‘humour et d’émotion, et quelques libertés avec les dates, ces années terribles. Le livre a connu un grand succès, a été traduit dans de nombreuses langues.
Un sac de billes a fait l'objet d'une adaptation au cinéma en 1975 par Jacques Doillon."- Enfin, dit-il, il faut que vous sachiez une chose. Vous êtes juifs mais ne l’avouez jamais. Vous entendez : JAMAIS.Nos deux têtes acquiescent ensemble.- A votre meilleur ami vous ne le direz pas, vous ne le chuchoterez même pas à voix basse, vous nierez toujours. Vous m’entendez bien : toujours. Joseph, viens ici.Je me lève et m’approche, je ne le vois plus du tout à présent.- Tu es juif, Joseph ?- Non.Sa main a claqué sur ma joue, une détonation sèche. Il ne m’avait jamais touché jusqu’ici.- Ne mens pas, tu es juif, Joseph ?- Non.J’avais crié sans m’en rendre compte, un cri définitif, assuré.Mon père s’est relevé.- Eh bien voilà, dit-il, je crois que je vous ai tout dit. La situation est claire à présent.La joue me cuisait encore mais j’avais une question qui me trottait dans la tête depuis le début de l’entretien à laquelle il me fallait une réponse.- Je voudrais te demander : qu’est-ce que c’est qu’un juif ?Papa a éclairé cette fois, la petite lampe l’abat-jour vert qui se trouvait sur la table de nuit de Maurice. Je l’aimais bien, elle laissait filtrer une clarté diffuse et amicale que je ne reverrais plus.Papa s’est gratté la tête.- Eh bien, ça m’embête un peu de te le dire, Joseph, mais au fond, je ne sais pas très bien.Nous le regardions et il dû sentir qu’il fallait continuer, que sa réponse pouvait apparaître aux enfants que nous étions comme une reculade.- Autrefois, dit-il, nous habitions un pays, on en a été chassé alors nous sommes partis partout et il y a des périodes, comme celle dans laquelle nous sommes, où ça continue. C’est la chasse qui est réouverte, alors il faut repartir et se cacher, en attendant que le chasseur se fatigue. Allons, il est temps de d’aller à table, vous partirez tout de suite après". (page 39-41)
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