Alphonse Boudard
Flammarion, 280 pages
1982
Les enfants de choeur est un recueil de nouvelles publié à l'aube des années 1980 par Alphonse Boudard (1925-2000). Écrivain, résistant, malfrat, il s'inspire de sa vie riche et dense pour raconter avec truculence des scènes de vie peuplées de personnages hauts en couleur.
Toutes les nouvelles ne traitent pas de la guerre. Nous retenons toutefois ce recueil pour ce blog, consacré à la guerre dans la littérature rappelons-le, car quelques uns de ces textes plongent le lecteur au temps de la seconde guerre mondiale. La faconde de l'auteur reconstitue à merveille le quotidien de ces temps agités.
Il en va ainsi par exemple de la nouvelle intitulée Mariette, qui conte une histoire de coeur entre Alphonse qui "bricole" un peu dans la Résistance et Mariette qui fait son éducation sexuelle au début de l'année 1944. Entre le Luna Park ,le cinéma où passent les films de Jean Marais, ou le 36 quai des Orfèvres, c'est un peu du Paris sous l'Occupation que l'auteur donne à voir.
Il y a aussi Le Prisonnier, un huis clos entre un FFI et deux GI's, à proximité de Rezonville, en 1944 face aux lignes allemandes.
"On nous cloque dans l'arrière-salle. Le menu aujourd'hui c'est du foie de génisse avec de la purée de pommes de terre et puis de la vraie crème renversée. En nous annonçant ces bonnes choses, la patronne, une forte mémère, elle fait des clins d'oeil à Mariette. Je respire que c'est à mon propos. Ça paraît bizarre... j'ai l'impression que les rôles, comme la crème, sont renversés, que Mariette se comporte avec moi comme un monsieur qui sort une petite nana qu'il vient d'emballer. Ces temps où je vous ramène... trente huit piges en arrière,... sont si phallocratiques dans les moeurs, que je me sens tout de même humilié! Devant la purée, le beurre, la tranche de foie, je bois toute ma honte en même temps que le picrate... une bonne bouteille de chinon pour arroser les victuailles. Autour de nous, les quatre ou cinq tables sont occupées par des couples plutôt cossus... les lascars aux costumes bien coupés... pompes triple semelle... les dames rebondies de la croupe... bagousées, emperlousées.. ça m'a l'air de ces fameux profiteurs dont on nous parle à Radio-Paris... Il fait chaud dans ce restaurant, tout est feutré, on se sent presque à l'abri de la guerre". (Mariette)
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